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HISTOIRE

TOP AUTEUR 2020 ROMAIN

Premier épisode | Épisode précédent

La danse de ob.ob5.ru | 6


ob.ob5.ru :

Tu es de retour ! Je ne sais pas trop si j’ai besoin de te faire un câlin ou si je tombe dans tes bras pour ne pas tomber au sol.
Romain...

Tu me ramènes à la réalité en me demandant s’ils sont encore là, un nan de ma part suffit à rétablir l’ordre.

- Est-ce qu’on peut avoir une discussion, sujet, verbe, complément, qui dure plus d’une minute et qui ne soit pas ponctuée par un claquement de porte à chaque temps de respiration ?
- Tu viens de me faire la phrase la plus longue que j’ai entendue de toi !

Il faut bien en rire et je t’emmène vers le canapé.
Assis pas trop loin, un peu quand même, on se touche du genou.
Je souris, car c’est l’articulation qui permet de plier et d’avancer.

- Ça va trop vite Romain
- Pas mal… développe

Je suis mal à l’aise, je n’ai pas envie de dire que mon cœur va trop vite, qu’il a envie d’aimer cet homme, que peut-être, il l’aime déjà. C’est déjà trop tôt d’exprimer l’amour. Quelle merde !
Comme je ne réponds pas, car je réfléchis plutôt qu’être factuel sur l’état de mes sentiments, tu soupires et vas chercher tes clopes dans ton blouson. Tu me manques déjà et j’ai encore l’impression de ne pas être à la hauteur.

- Ça ne va pas trop vite, on s’y prend comme des cons, c’est tout ! Tu veux quoi Cyril ?
- J’veux plus qu’on se chamaille comme ça.
- Tu ne me dis pas ce que tu veux !
- J’veux… je voudrais qu’on se connaisse, ma tête a besoin de te connaitre.
- Ta tête ? Pourquoi tu dis ma tête ?
- Mon mental. On va dire qu’on est très attiré l’un par l’autre, qu’on s’emballe, je comprends rien là.
- Je vois… T’as le mental qui la ramène parce que tu gères plus rien.
- Oui c’est un peu ça, même beaucoup ça lol. T’es ingérable aussi !!!
- Tu trouves ? Je suis un mec dans la rue, toi, qui m’offres ton corps et ta clé, qui m’enfermes chez toi tout en continuant tes p’tites routines sexuelles et parce que je ne suis pas docile, confiné dans ta chambre… Alors je suis ingérable ?
- Oh genre ! Oui j’ai pas fait une mise à jour sur mon site et à mon carnet d’adresses pour annoncer ma mort et ma renaissance auprès de toi et que pour toi.
- Te fous pas de ma gueule, tu exagères
- Nan c’est toi. Je ne te prive de rien ! Tu n’as même pas à sonner pour que je t’ouvre, pour que je m’ouvre même soit dit en passant ! En revanche, moi, je te cherche, et quand je te retrouve, bah tu pues l’oseille et la bave de mon oncle !

C’est sorti comme un crachat, du fond de la gorge, de poumons, en raclant… Avec bien trop d’émotion pour que ça échappe. Y a cette grosse glaire entre nous.

- Qu’est-ce qui te dérange le plus avec ton oncle. Moi ou lui ?
- Toi avec lui !
- Ce n’est pas juste !
- Quoi!!!!???? Que je l’interromps furieux.
- Laisse-moi t’expliquer simplement… Tu n’es pas un jaloux, alors, à qui tu en veux le plus, lui ou moi ? J’ai en partie répondu à la question…

Je me retrouve coincé. J’ai quoi pour le repousser ?
Colère ? Je ne sais pas. Mauvaise foi ? Je sens que je n’ai pas envie de cela avec lui. Humour ? Là je n’y arriverais pas parce que je sens que la tristesse s’est déjà trop emparée de moi…
Trop tard. Je ne vais pas pouvoir faire une pirouette on the dance floor avec la tête que j’ai et les jambes tremblantes.
Je n’arrive pas à répondre et il insiste avec empathie. Ça ressemble à deux grands yeux ouvert et câlin.

- Qu’est-ce qu’il t’a fait ?

Je ne peux plus le regarder dans les yeux, soit parce que j’ai honte, soit parce je pourrais me laisser déborder et ne vouloir que pleurer dans ses bras.
Pour une fois, mon orgueil me vient en aide sans s’imposer, en laissant la voix et la voie à mon émotion, mon besoin de « le » dire à quelqu’un comme Romain.
Alors sans le regarder je raconte quand même, en phrases lentes et réfléchies.

- C’est plutôt ce qu’il n’a pas fait… Il a le don pour accueillir les mecs égarés et les laisser faire…
- Égaré ?
- laisse-moi finir…
- Ok pardon…
- Égaré parce que j’avais 12 ans. Que j’avais pas assez de mon père, que j’avais grave merdé mon œdipe. J’avais beau chercher des pères, je n’en trouvais pas et vivais en insécurité affective.
C’était le jour de ma communion solennelle et j’ai senti la présence d’un homme à mes côtés. Lui m’écoutait, je pouvais tout lui dire, il était complice comme un jeune de ma génération et très sécurisant comme un adulte, il avait 27 ans en fait, moi 12. Comme il était aussi mon parrain, il a pris son rôle très au sérieux au regard de la famille puisqu’il a passé toute la journée avec moi, et s’est même proposé de me coucher.
Ne t’horrifie pas tout de suite Romain, tu vas voir la perversité de ce qu’il se jouait.

Tu me proposes de continuer, mais je vois bien le dégout dans tes yeux et sur ta bouche, si belle d’habitude.

Je me suis donc couché en sa présence. Je n’avais plus l’âge qu’on me raconte des histoires alors j’attendais qu’il parte.
J’étais triste, car ma journée s’achevait et surtout je ne reverrais pas avant longtemps mon parrain, ami, père et complice.

Il s’est mis à genou au pied du lit, les bras croisés sur mon lit, les coudes contre mon bras, il me regardait sans rien dire.
Ce jour-là, à ce moment précis, j’étais en premier contact avec le désir d’une autre personne.
Sans pouvoir mettre le mot sexuel, je sentais sa sexualité me vouloir. Sans mettre le mot dégout, c’est pourtant cela que je ressentais. J’avais envie de lui dire de partir, faire mine d’être fatigué, mais j’étais sans réactions, complètement immobilisé par des sensations désagréables et agréables, tant son regard était doux et gentil.
Et si c’était moi qui étais dégueulasse ? Celui qui pense sexe quand il pense amour et protection d’un jeune garçon.
Dieu merci il fit une grosse bêtise… Il s’est approché de mon visage et m’a embrassé, j’ai senti sa langue, le gout de sa salive.

Là, et je ne l’ai compris qu’il y a peu, j’ai accepté l’idée que pour conserver son amour de père, il fallait que j’accepte son désir sexuel aussi.
Après tout Papa n’aimait que maman, papa faisait du sexe avec Maman, donc c’était surement normal…
C’est cette graine merdique que j’ai plantée dans ma tête.
Il n’en fit pas plus, il est parti en me laissant en pleine confusion, et la graine empoisonnante qui germait.

Quand on se voyait quelques dimanches chez ma grand-mère, j’arrivais avec beaucoup d’appréhension, mais il savait comme personne m’écouter, répondre parfaitement à mon humour, jouer les papas quand j’avais besoin de conseils. Alors la journée était merveilleuse.
Merveilleuse jusqu’au moment où l’on se retrouvait seul dans une autre pièce, pendant que les « vieux » cuvait le déjeuner et se désaltéraient au calva.
Ce moment, isolés, quand il faisait sa petite danse, entre paternité et sexualité. Rien d’outrageux en apparence, mais son putain de désir pesait une tonne.
Il m’embrassait au début chastement puis sa langue rentrait dans ma bouche.
Comme je n’étais pas très réactif avec ma langue, il se retirait, et partait. Me laissant seul avec ma confusion.
Ensuite il rejoignait les adultes, ne s’occupant plus de moi. Cela a duré des années comme cela.

Sans aller plus loin dans le geste, il y allait par la parole et le regard. Il me posait des questions sur mes petites copines, sur le sexe, sur le mien.
Avec beaucoup de précautions, il m’amenait à parler de sujets excitants.
Tu vois Romain, c’est comme un boléro de Ravel.
Chaque instrument qui se rajoute est un mensonge, puis un espoir, un piège, puis un plaisir.
Une musique grandiose sur laquelle je dansais parfaitement bien et Alexandre était le chorégraphe.

À 16 ans, quand les hormones, la puberté rejoignent le boléro dans son acte final, j’ai plus facilement accepté le deal pervers pour son amour, sa présence que je voulais.
Le plus simple était que je tombe amoureux de lui comme un amant, plus comme un fils, afin d’oublier comment j’en étais arrivé là avec lui.
Comment ? Je ne le savais pas, je savais juste ce que je ressentais.
Ce n’était pas bon pour moi, je n’étais pas honnête, je troquais, j’étais sale, j’avais honte, je me reprochais ce qui arrivait.
Alors oui, le plus simple et honorable était de tomber amoureux de lui. J’estimais déjà que l’amour autorise tout, pardonne tout, alors tomber amoureux me paraissait être le meilleur moyen de purifier tout cela.

Il dormait dans la chambre d’ami en face de la mienne, on dormait ensemble ce soir-là pour rigoler, écouter de la musique, se raconter des histoires secrètes.
Rien n’était secret pour lui, j’aimais avoir quelqu’un à qui raconter mes secrets, par contre notre relation était secrète, je n’en parlais à personne et même pas avec lui…
Comme c’était malin de sa part. Bien entendu, je ne connaissais presque rien de son passé, de ses secrets à lui quand moi j’étais un livre ouvert.

Comme il l’avait fait dans bien des domaines, il me conseillait et vint le sujet de faire l’amour à une fille. Je dis fille puisque lui et moi étions prétendument hétérosexuels.
Il avait présenté des femmes à la famille, et moi j’avais Alexandra, Prisca, Béatrice, Delphine dans ma vie de petit garçon à adolescent.
Est-ce que d’abord je connaissais mon corps, est-ce que je me masturbais, est-ce que j’avais déjà fait des bêtises ?
Faire des bêtises, c’est le mot qu’il employait pour dire éjaculer, jouir.
J’étais puceau, j’avais bien mis mes doigts dans la chatte de 2 jumelles au CP, j’avais joué à essayer de bander avec Bertrand au CE2, touché une quantité de seins, roulé des heures de pelles à des filles. Rien de plus.
Tout ce qu’il me demandait me plongeait dans un univers très excitant et c’est logiquement que je me suis retrouvé à me faire sucer par lui… et que j’ai fait des bêtises.

Je suis vraiment tombé amoureux. Je suis vraiment tombé.
Cela a duré un an et demi comme cela. Pour des raisons pratiques, mes parents l’ont même hébergé chez nous.
Nous partions en vacances tous les deux aussi, n’était-ce pas merveilleux ce parrain qui s’occupe si bien de son filleul.
Une année, nous sommes partis avec un autre cousin de mon âge.
Pour divertir les soirées, on louait des films d’horreur et des vidéos pornos en VHS; ou on jouait au poker-déshabilleur.
Je te passe le processus, mais j’ai fini ivre mort à sucer ce cousin et Alexandre pendant ce temps là m’a enculé pour ma première fois, mineur avec 2 grammes donc.

J’ai passé mes weekends de 16 à 18 en boite de nuit, ivre un à deux soirs par semaine.
La créature que j’étais devenue lui a ensuite échappé, je me donnais à d’autres hommes, il ne me disait jamais stop.

C’est ainsi que de 16 à la crise de la quarantaine j’ai couché avec des milliers d’hommes plus vieux que moi, avec tous un petit quelque chose de paternel et décadent.
Par chance, j’ai rencontré un homme qui m’a accueilli tel que j’étais, qui aimait ma jeunesse de 8 ans de moins que lui, mais qui a su me dire Stop !
On va s’aimer, mais pas comme tu le fais d’habitude. Ça a duré 19 ans. Lui m’aimait parfaitement, mais moi je fonctionnais encore trop sur les acquis, sur l’éducation d’Alexandre.

En toute logique Alexandre à disparu de ma vie quand j’ai appris à aimer différemment.
Juste avant qu’il disparaisse, il m’a annoncé qu’il était séropositif. Dans les années 80, c’était terrifiant, la mort assurée en 10 ans max.
Depuis quand l’était-il ? Je ne le savais pas, c’est un copain d’école avec qui je couchais de temps en temps qui m’a payé mon premier test VIH, sans ordonnance tellement c’était honteux, heureusement il était négatif.
Fin du Boléro d’Alexandre.

Tu me regardes en silence, je ne sais pas ce que tu penses. Oui ce n’est pas simple…
Tu finis par me demander si je vis ça comme un viol ?
Je te réponds que non. J’aurais préféré. Cela m’aurait permis de combattre quelque chose de « palpable ».
Il ne m’a pas violé, il n’a juste pas dit STOP.

C’est la seule chose que je lui reproche.
« J’étais un enfant bordel ! » dis-je cela en criant, puis tu par les larmes. Le calme revenu je poursuis :

Bien sûr tout ce schéma, ce mensonge, cette graine devenus un arbre ombrageux, cette complexité, cette perversité, je ne sais quel mot utilisé en fait, même aujourd’hui, bref, mon éducation m’a conduit à bien des addictions et dépressions.
Il aura fallu que mon corps me lâche, que je tombe malade pour que j’accepte de me faire aider par une psy.
Ce n’est que maintenant que je comprends ma part de responsabilité sans m’en vouloir. Et même sans lui en vouloir. Car oui, que sais-je de lui en fait ? Pas grand-chose, pourquoi en est-il arrivé à avoir une relation incestueuse et pédophile avec moi ? Je ne le saurais jamais.

Donc pour répondre enfin à ta question, c’est à lui que j’en veux, parce qu’un adulte devrait dire STOP à un enfant, adolescent qui joue trop de ses charmes pour un peu d’amour.
Quand j’entends qu’il t’a montré du respect, qu’il a su t’accueillir quand tu en avais besoin, alors oui, je souffre comme une bête mal abattue.

- Mais comment se fait-il qu’il soit là, à côté ?
- J’ai fait banqueroute l’année dernière, quand il a appris ça par ma mère, il m’a proposé de venir habiter chez lui. J’ai refusé. Il a fait cinquante-mille de travaux pour diviser son appartement en deux. J’ai accepté. Tu vois, je ne suis pas encore complètement libéré.
- Mieux vaut un p’tit chez soi en effet.
- Tu sais ça va loin, à cause cela, j’ai passé un contrat avec moi-même à l’adolescence. Ne jamais tomber amoureux ou fantasmé sur un jeune homme, ne pas avoir d’enfant, ne plus draguer à partir de 50 ans. J’ai encore reçu un email hier d’un jeune homme de 18 ans qui veut être mon passif soumis et découvrir le monde gay, cela me rend si triste… Car il va le trouver son guide qui ne lui dira pas Stop.

- Tu ne dis plus rien Romain ?
- Euh… comment dire… j’ai un trop beau cadeau dans les bras… Je ne sais pas comment faire…


Romain :

J’ai l’air de quoi, moi, maintenant avec Cyril qui sanglote sur mon épaule ?

Sûr qu’il veut me faire culpabiliser ! Il joue sur du velours ce petit salaud. Je ne sais pas pour vous, mais moi, j'ai été élevé dans la culpabilité comme tout bon petit français qui se respecte. C’est à croire que j’étais né uniquement pour faire de la peine à ma maman. « Mais qu’ai-je fait au bon Dieu pour mériter un fils pareil ? ». N’arrêtait-elle pas de dire à tout moment.

Serais-je donc la pire des crapules dans notre si bonne société judéo-chrétienne ???

Je ressers mes bras autour de toi et je questionne en grommelant :

- Ils sont toujours là TES cadors d’opérette ?

Le nez toujours collé dans mon blouson, tu réponds : « nan » comme si ce n’était pas plus simple de répondre « non » comme tout le monde. Tu relèves la tête pour me décocher un sourire qui me fait fondre et tu m’entraines vers le salon. Et moi, gros couillon, je me laisse faire. Il faut dire que je suis soulagé de te voir réagir ainsi. Je m’attendais à un affrontement plus hard, mais je ne vais pas être déçu du voyage.

Assis côte à côte dans le grand canapé nous gardons un instant le silence. Nos genoux se touchent et nous nous raclons la gorge. L’orchestre accorde ses instruments.

C’est drôle comme je me sens bien auprès de toi. Maintenant, je n’ai pas trop envie de discuter et pourtant, quand j’interroge ton profil, je comprends que tu veux mettre les choses à plat.

- Ça va trop vite Romain. Que tu murmures.

- Pas mal… développe. Que je soupire, résigné.

Et là, tu me balances du lourd. Tu me dis que tu ne sais pas où tu en es avec moi alors que moi je ne sais que trop où nous en sommes. Tu te débloques devant moi comme un petit garçon qui veut me montrer son genou écorché. L’arrogant ob.ob5.ru ne serait-il qu’un petit garçon blessé ? Je constate vite que oui. Tu es un homme blessé et lucide qui refuse de s’épargner, mais tu m’appelles et tu me refuses tout à la fois.

Que dois-je faire ? T’écouter ?

Alors je t’écoute. Je t’écoute me raconter comment le si gentil tonton Alexandre a su te capturer. Comment il a su si bien te révéler tous les petits démons qui gambadaient dans ta tête. Comment il a su si bien te charmer. Pour moi, Cyril, tu es un Mowgli que le serpent Kaa a réussi à hypnotiser. Je me demande s’il faut que je te plaigne ou bien s’il faut sourire. N’es-tu pas à ton tour un serpent hypnotiseur ? N’essaies-tu pas en ce moment de faire vibrer ma corde sensible ?

J’ai beau t’aimer Cyril, tes propos me choquent un peu. Es-tu réellement une victime ? Avant que je n’aie 16 ans bien des hommes ont essayé de me toucher. Je les ai tous repoussés et pourtant étais-je si différent de toi ? Je n’avais que ma mère comme référence et pourtant je ne cherchais pas de père. Mais peut-être étais-je déjà mon propre père ? C’est marrant, non, de s’auto-paterniser ?

Tout en parlant, tu m’interroges du regard et tu dois déceler parfois un peu de dégoût dans mon expression. Je suis désolé pour toi, mais je n’y peux rien. Après tout je ne t’ai jamais demandé de me déballer tout ça. Je voulais juste savoir si j’étais autre chose qu’un numéro pour toi.

Accroche-toi Romain parce que maintenant tu me racontes que tonton Alexandre est sidéen et que tu as baisé avec autant de mecs que moi j’ai fumé de paquets de cigarettes dans ma putain de vie. Je ne suis pas du genre trop exclusif, mais nous avons tous nos limites… non ?

Pour finir de me confusionner, tu m’apprends que tu consultes une psy dans l’espérance de recouvrer ta virginité morale. Trop facile, mec, de mettre tout ça sur le dos de l’inéluctable marche du Destin. Ne faudrait pas me prendre pour une bille, tout de même !

J’ai comme un ronron dans la tête quand tu t’arrêtes de parler. Un petit whisky serait le bienvenu, mais tes mains sont déjà en train de déboucler ma ceinture. Mais qu’est-ce que je fous ici, bordel !!!

Tu es trop, ob.ob5.ru ! Un petit coup de confesse et tu n’attends même pas l’absolution pour déloquer ton confesseur. Faut le faire quand même !!! Tu ne manques pas d’air… Tu feras fortune si tu fais breveter ta recette !

Tu m’arraches mon pull, tu ouvres ma chemise, tu m’écartes la braguette pour saisir mes couilles à pleines mains. J’ai un hoquet quand tu engloutis mon gland dans ta bouche. Je bande dur, mais je sais que j’ai les couilles sèches. Il n’y a que dans les histoires du site de ob.ob5.ru que les mecs éjaculent comme des mitrailleuses. J’ai beau être bien équipé, l’intendance ne suit plus… Il faudrait que je dorme un peu pour me recharger. Pitié ob.ob5.ru !

Mais que t’importe que je sois vidé. Tu veux ton plaisir. À peine le temps de compter jusqu’à 10 que je suis nu, que tu es nu et que tu t’empales sur mon phallus. Tu me torpilles les yeux de ton regard carnassier. Je suis maintenant ton objet je n’ai même plus la force de me rebeller. J’ai presque mal quand tu coulisses sur moi, mais tu t’en fous. Je suis à toi.

Tu es le sphinx qui a vaincu Œdipe. Tu es sans pitié et maintenant j’aime ça.

Je ne sais pas si je jouis à blanc, mais le cri que je pousse a dû alerter tout le quartier. C’est un étrange plaisir douloureux qui me convulse le ventre. Tu m’asperges le torse de ton foutre avec un grondement de victoire. Dès à présent tu pourras te vanter d’avoir vaincu le valeureux Romain.

Ta bouche s’empare de la mienne alors que j’essaie de reprendre ma respiration. Ton baiser dévorant m’exténue. Tu me couches sous toi comme une goule insatiable. Ce que tu ne donnes pas à ob.ob5.ru, ob.ob5.ru le prend.

Mais quelles sont douces et expertes tes caresses quand tu me portes sur ton lit. Pour m’achever, tu gobes mes couilles à présent desséchées. Je m’entends gémir et demander grâce. Je ne sais pas si je me suis endormi, mais quand j’ouvre les yeux, tu me regardes en souriant, la tête appuyée sur une main.

Dans le silence, j’entends comme une lointaine symphonie et j’accepte pour un instant le présent. Ce présent qui veut que nous soyons amants, couchés dans ce grand lit. Mais je voudrais ne pas t’aimer, Cyril, parce que je ne suis pas fait pour toi.

Après une caresse sur ta joue, je me lève et je vais prendre un stylo-bille sur ton bureau. Je me recouche à côté de toi et je pose le stylo sur ma poitrine nue.

- Maintenant, tatoue-moi mon numéro de mec sur le pec gauche. Que je te demande sans sourire.

- Numéro de quoi ? Que tu t’étonnes.

- Mon numéro dans ta liste de mecs, pardi. 1768-ème ? 2997-ème ? 4361-ème ? plus ? Que j’insiste lourdement.

J’ai conscience que je suis méchant, cruel même, mais ça me fait du bien. Faut quand même que je marque le coup, je ne peux pas laisser passer ça comme ça. J’ai ma fierté de mec quand même… même si elle est mal placée, du coup. Cyril me regarde comme s’il me découvrait et se saisit du stylo-bille. La tête inclinée d’une manière émouvante, tu traces soigneusement le chiffre trois sur ma peau, puis tu te laisses tomber sur moi, le visage contre ma poitrine. Je suis incapable de savoir si tu ris ou si tu sanglotes. Ton torse est secoué par petites saccades et ta main serre convulsivement mon biceps.

- Arrête Romain… tu es un sadique. Arrête s’il te plait… Que tu implores.

- Bon… OK, alors dis-moi que je suis le meilleur. Que j’exige.

- Oh oui ! Tu es le meilleur, de loin… de très loin !

- Dis-moi que j’ai la plus grosse queue de tous tes mecs.

- Oh oui ! La plus grosse de toutes les queues… la plus belle aussi ! Que tu rigoles.

- Dis-moi que je baise comme un dieu. Que j’exige encore.

- Oh oui ! Tu baises encore mieux que Jupiter ! T’étouffes-tu de rire.

- Bien, je vais peut-être commencer à te pardonner. Que je roucoule, magnanime.

Je te capture dans mes bras et nous roulons sur le lit en riant comme des fous.
Deux pigeons, perchés sur la balustrade, s’interrogent du regard en se demandant pourquoi les humains font autant de bruit quand ils sont à l’horizontale.

Mais tu n’es pas sorti d’affaire parce que, rassuré et malicieux, tu t’accoudes sur mon ventre et le menton posé entre tes mains en coupe, tu me demandes témérairement… trop témérairement :

- Et moi Romain, dis-moi, j’ai quel numéro dans ta liste ?

- Tu es le troisième.

On entend une mouche voler. Je ne sais pas d’où sort cette mouche, mais on n’entend qu’elle, je vous l’affirme.

- Quoi… seulement le troisième ??? Que tu t’étrangles.

- Avec le premier mec ça a duré une heure. C’était histoire d’essayer les hommes parce que je ne voulais pas mourir idiot. Le second ça a duré 13 ans, c’était MON mec. Le troisième c’est toi. Que je précise.

- Mais… mais… ? Le reste du temps ?

- C’était ma femme, j’ai été marié 15 ans… le reste du temps d’après, c’était la veuve poignet ou bien des pipes. Tu sais tout. Que je conclus en bâillant.

Je serais un extraterrestre avec une peau toute bleue et des petites antennes sur la tête, que tu ne me regarderais pas différemment.

- Je n’ai plus envie d’aimer, Cyril, ça fait trop mal. J’en ai marre… J’en ai marre d’être un looser de l’amour. Que je rajoute.

- Mais moi ??? Que tu cries presque.

- Toi ? Tu es un accident de parcours… c’est pour ça que je t’en veux.

- M’en vouloir ? Pourquoi m’en vouloir ? Que tu t’indignes.

- Parce que j’aurais pu tomber sur quelqu’un de plus simple, ne crois-tu pas ? Qu’est-ce que je vais faire avec une machine à baiser ? Avec toi, je pars déjà perdant. Avant même de dire ouf, je suis déjà le roi des cocus. De plus, tu es ob.ob5.ru, un prince du sexe virtuel, adulé par des milliers d’obsédés du cul qui écrivent et lisent des fantasmes inimaginables sans un zeste de pudeur. C’est lourd à gérer, crois-moi.

- Mais toi aussi tu écris des histoires que tu publies sur mon site. Tu n’es pas différent des autres. De quoi te plains-tu ? Susurres-tu, les yeux étrécis comme ceux d’un chat pas content.

- Je ne me plains pas, Cyril, je constate simplement. Comme les autres, j’ai écrit des histoires, mais maintenant, grâce à elles, tu as mon mode d’emploi. Pas vrai ?

Après la mouche, c’est un ange qui passe. Un ange qui prend bien son temps.

Tu ne réponds pas, mais tu t’es de nouveau emparé du stylo-bille pour dessiner un petit cœur sur ma poitrine. Tu y rajoutes une petite paire d’ailes et tu le transperces d’une flèche. Tu as dessiné le cœur autour du chiffre 3. On dirait un tatouage de taulard. Je sais que tu dessines bien mieux que cela, mais la naïveté de ton dessin me touche. C’est un message, je crois.

Je noue mon pull autour de mes hanches et je vais griller une cigarette sur le balcon. Il fait frais et le soleil décline jusqu’à l’ombre, mais je ne suis pas frileux. La rue est presque déserte et il règne une étrange ambiance. Le président de la République va prendre la parole au journal de 20 heures. Je ne me sens que vaguement concerné et pourtant j’appréhende quelque chose.

De l’autre côté de la grille de séparation, Alexandre fume un cigarillo. Il se rapproche d’un pas nonchalant en fixant le petit cœur gribouillé sur ma poitrine.

- Cyril t’a mis au parfum, je suppose ? Me dit-il en me plantant son regard d’onyx dans les yeux.

- Mouais, on peut dire ça comme ça. Que je rétorque en restant évasif.

- Après tout, ce n’est pas plus mal comme ça. Estime-t-il en s’enveloppant d’un nuage de fumée.

Je regarde cet homme que la vieillesse va bientôt saisir pour en abîmer encore davantage la beauté.
Après les propos de Cyril, je devrais le considérer comme un pervers, comme un salaud, mais je n’y parviens pas. Que serais-je moi-même dans 20 ans, dans 30 ans ? Sous son regard, je me sens toujours si beau, si fort et encore si jeune…

- Tu n’es qu’un naufrageur, Alexandre. Mais j’aimerais bien que tu me récupères encore sur ta grève. Que je grommèle, satisfait de ma phrase que je pense imagée et poétique.


Suite de l'histoire


ob.ob5.ru & Romain

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